Des Saintes-Maries-de-la-mer à Plan-d’Orgon, différents aménagements sont en cours dans le Pays d’ Arles pour développer ces voies dédiées aux amoureux de la petites reine… qui poussent à la roue
Article La PROVENCE du 8 nov.2019 Par Jean-Christophe Magnenet
Ils étaient une quarantaine à se lancer dans l’aventure. Au cours du mois de septembre, un groupe de cyclistes s’est retrouvé à Nice, sur la promenade des Anglais, pour démarrer une longue traversée de la région Sud à vélo. Objectif : « rejoindre les Saintes-Maries-de-la-mer », sourit Alain Michel, le délégué régional de l’Association d’utilisateurs des véloroutes et voies vertes (AF3V), qui était parmi eux. Bord de mer azuréen, puis varois, passage – « difficile » – au coeur de l’agglomération marseillaise et des sites industriels de Fos-sur-mer – « une zone très complexe à cause des multiples périmètres de sécurité » – avant de finir par une traversée de la Camargue, sur la digue à la mer… « Nous voulions faire un test grandeur nature, explique le bénévole, donner un coup de projecteur sur ce parcours qui longe le littoral et pousser les collectivités à accélérer l’aménagement de cette véloroute, la V65. » Véloroute ? « Il s’agit d’itinéraires de longue distance, jalonnés et aménagés -sauf sur les routes à très faible trafic- pour les cyclistes », décrypte Alain Michel. Un schéma national a été tracé dès 1998. Des véloroutes existent même à l’échelle européenne, comme la ViaRhôna (EV17) et la Méditerranéenne à vélo (EV8), qui courent dans le Pays d’Arles. Ce territoire est également traversé par la V862 au nord, et la V65, en projet.
Bandes cyclables ou voies réservées (en site propre), ces véloroutes ont tout d’abord été pensées pour un usage touristique, afin de renforcer l’attractivité des régions. « La France est le deuxième pays d’Europe qui attire le plus de cyclistes itinérants grâce à ses paysages magnifiques, estime Alain Michel. La manne touristique est considérable. » Mais ces aménagements font aussi sens pour les habitants du territoire. « À titre d’exemple, il apparaît que 80 % des usagers de la ViaRhôna dans le Pays d’Arles n’habitent qu’à quelques kilomètres de cette véloroute », pointe ainsi le délégué régional d’AF3V.
Les collectivités à la manoeuvre
« C’est un réel levier pour développer l’activité touristique, mais cela représente aussi une alternative à la voiture pour des trajets du quotidien », confirme Aurélie Gabon, chef de projet au sein du Pôle d’équilibre territorial et rural (PETR) du Pays d’Arles. « Développer le vélo est très pertinent sur notre territoire, plutôt plat et où il pleut rarement », note-t-elle. Les collectivités locales semblent l’avoir bien compris puisqu’il y a peu, deux intercommunalités du secteur, ACCM et Terre de Provence, ont répondu –avec succès– à l’appel à projets « Vélo et territoires » lancé par l’Ademe (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie). « Nous allons pouvoir notamment établir un schéma directeur cyclable à l’échelle de l’agglo, en cours d’année prochaine, pour mieux mailler le territoire et bénéficier du Fonds mobilités actives, créé par l’Etat », détaille, du côté d’ACCM, le directeur général de l’aménagement et des services techniques, Alain Beaumont. « Les véloroutes sont l’un des maillons d’une chaîne de solutions pour trouver des alternatives à la voiture, » complète Aurélie Gabon. « Le but est simple ! Il s’agit d’augmenter le nombre de cyclistes pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et les encombrements sur les routes, ajoute Jérôme Cassagnes, chargé d’études en mobilité active au Cerema (voir interview ci-dessous). Il y a un enjeu de taille en terme de santé et d’environnement. » De nombreux coups de pédale restent encore à donner pour boucler le schéma régional véloroutes, dont 65 % des 2 041 km est encore à réaliser. « Un comité d’itinéraire, réunissant les collectivités et les associations d’usagers, est en cours de mise en place pour faire avancer l’aménagement de la V65, indique Alain Michel. Il y a encore des problématiques de balisage, de passerelle, de revêtement… » Pour lui, le jeu en vaut la chandelle : « En France, cette véloroute est sans nul doute celle qui possède le plus de potentiel. »
Quatre véloroutes à travers le Pays d’Arles
Le schéma national vélo compte 23 330 km, dont 68 % ouverts. Au sein de la Région Sud, le schéma (révisé en 2016) compte 9 véloroutes, dont 2 à l’échelle européenne. Le Pays d’Arles est traversé par 4 d’entre elles, aménagées par le Département, en charge de la gestion des routes :
La ViaRhôna, (EV17, itinéraire européen) est entièrement jalonnée. En 2018 a été mis en service l’aménagement de 44 km reliant Arles à Port-Saint-Louis-du-Rhône.
La Méditerranéenne à vélo (EV8, itinéraire européen) est entièrement jalonnée en France. Entre Tarascon et Saint-Etienne-du-Grès, 9 km seront aménagés d’ici 2021 pour 1,5 millions d’euros (M€). Entre Saint-Rémy-de-Provence et Plan-d’Orgon, 19 km aménagés d’ici 2021 pour 3,1 M€.
La V862 « Val de Durance » n’est pas encore jalonnée. Entre Plan-d’Orgon et Barbentane, 22 km en site propre doivent être aménagés, pour un coût de 4,5 M€ d’ici à fin 2022. Une section de 2 km est programmée à Châteaurenard.
La V65 « Azur Camargue » (nom provisoire) n’est pas encore jalonnée. L’itinéraire n’est pas encore arrêté. L’aménagement de la traversée de Salin-de-Giraud (700 m pour 550 000€) est en cours de réalisation. Des études sont en cours pour la suite de l’itinéraire en direction de la digue à la mer. La poursuite de l’aménagement reliant les Saintes-Maries-de-la-mer à Port-Dromar, soit 1,1 km pour 985 000 €, est annoncée pour 2021.
« Ces investissements s’inscrivent dans la cadre du Schéma directeur vélo (SDV) du Département, adopté en 2016, et des engagements pris dans le cadre des Etats généraux de Provence, en 2016 également, ayant conduit à la mise en place d’un programme budgétaire de 40 M€ sur cinq ans », indique-t-on du côté du Conseil départemental. Plus de 10 M€ ont également été déployés par la Région depuis 2015.
« Il y a un potentiel à développer dans le Pays d’Arles »
Le Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) est un établissement public de l’État créé en 2014 pour développer l’expertise publique en matière d’aménagement, de cohésion territoriale et de transition écologique et énergétique.
Quels sont les principaux écueils au développement des véloroutes et à l’usage du vélo ?
Ces itinéraires sont parfois complexes à aménager car ils traversent différentes collectivités qui doivent se coordonner entre elles. Il s’agit de permettre à un maximum de personnes de se déplacer à vélo et d’offrir un aménagement sécurisé pour les attirer vers cet autre mode de déplacement. Au-delà de la question de la distance, les principaux obstacles à l’usage du vélo se posent en terme de sécurité et de peur du vol. Des freins qui sont simples à lever. Avec plus de parking à vélos et plus de voies aménagées, le nombre d’usagers augmente clairement… Des investissements dont le coût est par ailleurs raisonnable. Il y a encore beaucoup de chemin à faire et leur développement relève des stratégies choisies par les collectivités.
Quelle est l’action publique dans ce domaine ?
Il y a clairement eu, durant longtemps, un manque de volonté politique. Mais les choses bougent sous la pression des usagers. Tout le monde souffre de la congestion des axes routiers. Ces aménagements sont un moyen d’agir. Depuis la loi NOTRe, la Région est l’autorité organisatrice de l’intégralité de la mobilité interurbaine. Une enveloppe financière importante est aujourd’hui consacrée sur ce sujet par la Région Sud.
Sur des territoires périurbains, comme le Pays D’Arles, l’usage du vélo peut-il vraiment se développer ?
Oui, contrairement à ce que l’on peut penser. Les enquêtes démontrent que sur ces territoires, 45 % des déplacements se font à moins de 5 km. Cela équivaut à environ 20 minutes à vélo… Il y a donc un potentiel énorme à développer sur ces zones, où le vélo peut être largement utilisé pour des déplacements du quotidien.
Source : https://www.laprovence.com/article/edition-arles/5744251/changement-de-braquet-pour-les-veloroutes.html